Rembob'INA, meilleure émission de TV de l'année par Th. Morales et Quand Jupiter s'embourbe de Jacques Aboucaya

 

Ce programme nous sauve de la torpeur tous les dimanches à 21h00 sur LCP Assemblée Nationale


À la Noël, encore plus qu’à un autre moment de l’année, l’indigence de la télévision saute aux yeux. Les téléspectateurs en ont des frissons. Durant ce long tunnel de deux semaines, on a préféré se brancher sur une chaîne d’info continue et s’étonner d’aussi bien connaître le nom des infectiologues-stars plutôt que d’assister aux déplorables bêtisiers et autres « best-of » imbitables. Programmes poussifs, absence de création, vieilles ficelles, décors dégoulinants, cotillons mouillés et rires en boîtes, la télévision est en vacances. Elle n’a jamais donné autant d’arguments pour s’abonner à Netflix.

Revisiter le passé de la télé

En roue libre, elle se regarde tourner à vide. Elle s’admire de se voir si laide et si bête. Elle fermente dans une médiocrité avec l’assurance sournoise des intouchables. Ces gens-là se savent immunisés contre le divertissement de qualité et l’intelligence cathodique. Et puis, personne n’ira leur demander des comptes, ils ont les clés de la boutique. Au gré des rediffusions, et à force de zapper frénétiquement, on finit cependant par tomber sur le magazine « Rembob’INA » (LCP Assemblée Nationale/Canal 13 de la TNT). Ouf, nous sommes enfin sauvés ! Ce magazine qui revisite l’histoire de la télé n’a rien de faisandé. Il est souvent brillant, malin et éclairant ; instructif sans être plombant ; laissant toujours filtrer une forme d’audace vintage, si rare de nos jours.

L’animateur Patrick Cohen y excelle, à bonne distance, curieux et inspiré, souriant et pertinent, il a trouvé sa voie médiatique. Loin des vaines joutes politiques à la radio, son plaisir à présenter ce programme est communicatif. Quand il parle des artistes, sa voix se libère. Elle prend véritablement son envol. Et si c’était lui le successeur de Jacques Chancel ? « Rembob’INA » est, à la fois, une bulle de nostalgie, un sas de décompression salutaire mais aussi un regard sur le temps long, une perspective des enjeux télévisuels au fil des différents pouvoirs en place. Les nostalgiques y feront leur nid douillet, les cyniques se féliciteront de l’évolution des mœurs. « Rembob’INA » ne moque pas le passé, le magazine n’instruit pas à charge, il explique, il traduit, il informe en divertissant. Il a surtout l’immense mérite de ressusciter de merveilleux programmes oubliés, des « Brigades du Tigre » à la « Controverse de Valladolid », de « Vidocq » à « 30 Millions d’amis », de « Dim, Dam, Dom » à « Médecins de nuit ». Les atrabilaires ne peuvent pas comprendre l’émotion de revoir un « Apostrophes » avec Simenon, des épisodes de la série « Petit-déjeuner compris » ou un « Discorama ».

Le meilleur remède au blues du dimanche soir

L’une mes plus belles découvertes de ces dernières années « Cécilia, médecin de campagne », je la dois à « Rembob’INA ». Le fantôme de Nicole Berger ne me quitte plus. Pour une bonne santé mentale, mieux vaut abuser de Jean-Christophe Averty et Denise Glaser que de la télé d’aujourd’hui. Durant les fêtes, le numéro consacré à « l’humour absurde » (encore visible en replay) avec Daniel Prévost en invité m’a enchanté. Ronny Coutteure et Roland Topor dans l’improbable « Merci Bernard » diffusé sur FR3 en pleine décomplexion mitterrandienne m’ont procuré un shoot de mélancolie. Mais surtout, « Rembob’INA » a sauvé mes vacances de Noël avec le portrait de François Chalais composé de nombreux extraits de « Cinépanorama » et « Reflets de Cannes ». Le journaliste cinéma (1919-1996) s’y révèle un interviouveur phénoménal, à la décontraction abrasive, ses questions obligent les acteurs à sortir des sentiers convenus de la promotion. Et pourtant, nous sommes dans les années 1960, si prudes et conventionnelles, sous une autorité de tutelle tatillonne.

Face à une B.B rayonnante, il attaque tout de go : « Chère Brigitte, vous n’avez pas tellement bonne réputation ». Elle se marre. Il extorque au jeune Belmondo cette phrase : « J’ai pensé au cinéma très tard au moment d’A bout de souffle ». Il taquine Françoise Dorléac sur son ambition non dissimulée d’être la meilleure : « Ça ne vous intéresse pas d’être la deuxième ou la troisième ». Un Delon rigolard au sommet de son charme vipérin soupe quand Chalais lui demande : « Vous avez beaucoup de problèmes ? ». La grâce irrésistible de Jane Fonda répondant en français est une leçon de séduction pour toutes les actrices en manque d’esprit. Elle avoue donner parfois des conseils à son père et confesse : « Mon dieu, je ne suis jamais vraie ou bien toujours, je ne sais pas ». Depuis que je regarde « Rembob’INA », je n’ai plus le blues du dimanche soir ! 

 

Dans un entretien avec les lecteurs du journal Le Parisien, le chef de l’État affirmait mardi vouloir « emmerder » les non-vaccinés. Aux côtés d’Ursula von der Leyen, le président Macron a confirmé hier « assumer totalement » ses propos


Incroyable. Inimaginable. On n’a jamais entendu, sous la vulgarité du propos, semblable bassesse de la pensée. Voire une telle indigence. À croire que Jupiter, qui rend fous ceux qu’il veut perdre, a retourné contre lui-même ses propres armes. Qu’il a vacillé de son trône, abandonné les hauteurs de l’Olympe pour se vautrer dans les bas-fonds. On le croyait, jusqu’ici, auréolé d’une manière de vernis. Capable  en tout cas, de conserver assez de maîtrise langagière pour s’abstenir d’user d’un vocabulaire ordurier. Ne fût-ce que pour se distinguer d’un vulgum pecus pour lequel un homme de sa qualité ne saurait éprouver que dédain.

Donc, le président, loué soit son nom, « a envie d’emmerder » certains de ses compatriotes. Ou de ses sujets. Étrange désir. À vrai dire, il est déjà surprenant que Celui que les Français ont placé à leur tête exprime ses envies. Elles pourraient être banales, du genre « j’ai envie d’un bon plat de boudin aux oignons ». Elles ne sont que nauséeuses. Ses envies le ramènent, en somme, dans un univers familier dont tout laisse penser qu’il ne s’est jamais extirpé, en dépit des apparences : celui de la fange. La scatologie le rattrape à grands pas. Sa vindicte, son courroux s’expriment sans fard contre ceux qu’il considère comme ses ennemis et qui, par là-même, n’ont droit à nul respect. Étrange façon de se rabaisser soi-même.

Quant au fond, il est, à l’évidence, plus révoltant encore. Il repose sur un postulat, la toute-puissance absolue du pouvoir qui ne saurait tolérer aucune objection, aucune contestation. Magister dixit. Même l’infaillibilité pontificale, souvent stigmatisée comme symbole d’absolutisme, avait ses limites. Elle se bornait au seul domaine théologique. Ici, le président détient la vérité absolue, y compris dans un secteur où celle-ci ne saurait exister, celui de la science. Les palinodies successives des scientifiques, les caprices de vaccins dont l’efficacité se révèle à l’usage des plus relatives, la promptitude avec laquelle sont muselés tous les spécialistes qui se permettent le moindre doute sur la doxa officielle, tout cela montre qu’en dépit des rodomontades, le pouvoir navigue à vue. Il se cramponne à des certitudes au mépris de la sagesse la plus élémentaire. Il sollicite, ou plutôt exige des Français une soumission pleine et entière, quitte à sacrifier la liberté individuelle. Nul appel à la sagesse, à la conscience de chacun. Il s’agit seulement d’obéir, toute question de liberté individuelle n’étant justiciable que d’un coup de balai de latrines.

Il est juste d’associer à ce comportement indigne la meute des suiveurs confits en dévotion, zélotes du despote. Ainsi des ministres, à commencer par le pantin grotesque qui est, paraît-il, le premier d’entre eux. Et l’on n’aura garde d’omettre Sa Suffisance le ministre de la Santé, ni le falot porte-abois du gouvernement, tous prompts à relayer, avec semblable arrogance, les propos scandaleux de leur maître. Décidément, l’année qui s’ouvre sera nauséabonde ou ne sera pas.

 

 

 

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